Ma famille. Un mot qui avait trop d'importance pour moi. L'attachement que leur portait était immensément destructeur pour moi, mais c'était dans ma nature, dans mon sang. C'était mon essence, ma vie. J'étais comme ça, c'était dans ma nature de faire tout, de donner tout pour les personnes que j'aimais. Et la perte était douloureuse, brutale. Je fournissais trop d'énergie dans l'amour de mes proches, qu'en cas de dommages je me fracassais face contre terre. Et depuis leur mort, c'était ce qui se passait chaque minute, de chaque jour. Mes blessures étaient ouvertes en permanences, et les personnes qui remuaient le couteaux dans la plaie, celles qui s'amusaient à tailler profondément mes égratignures méritaient l'indifférence. Et il y avait ces personnes, comme Jeremiah, qui pansaient mes plaies. Et même si le sparadrap ne tenait qu'une seconde, je savais que ces personnes étaient bonnes, et méritaient toute ma reconnaissance. Comme Jeremiah. Alors quand le jeune homme m'avait offert un point d'appui, de quoi remonter la pente, avancer – ne serait-ce que d'une marche, d'un pas – j'avais saisis la main qu'il me tendait. Et les souvenirs qu'il me rendait ne me rendaient pas heureuse, mais moins malheureuse. Et ce n'était pas négligeable. Les mots qui sortaient de ma bouche étaient abîmés par les sanglots, le coeur battant et torturé, les émotions m'emportaient. Le jeune avait esquissé un sourire, simplement compatissant. Je l'observai sortir un mouchoir de sa poche et me le tendre - « Non je ne te trouve pas ridicule... » - J'avalai ma salive, tremblante. Je me jetai dans ses bras sans prendre la peine de saisir le mouchoir, me réfugiant contre mon ami. Je m'agrippais si fortement à lui, comme s'il pouvait disparaître d'un instant à l'autre, ne voulant pas le perdre lui aussi. Depuis la mort j'accordais trop d'importance aux personnes qui m'entouraient, imaginant qu'elles pouvaient se volatiliser dans un souffle et m'abandonner comme ils l'avaient fait. Jeremiah passa un bras dans mon dos et se mit à le frotter, ce qui me rassura. Il me serrait contre lui, et je fus comme apaisée, soulagée, mais toujours faible et souffrante de tout le malheur qui m'entourait. Quand je le remerciai il me serra encore plus, mais j'avais encore peur. Peur que tout s'effondre, alors que j'étais en train de reconstruire ce qui avait été briser, en train de me reconstruire après la mort dévastatrice de le perte de ma famille. Je serrai mes paupières de toutes mes forces, l'une contre l'autre, laissant s'échapper les larmes abondantes. Je me reculai légèrement, et tout près de son visage, je plongeai mon regard d'un bleu intense dans les yeux de Jeremiah - « Ils sont partis. Ma mère et mon père, ma soeur. Ils m'ont abandonné à mon triste sort, trop tôt. J'avais encore tellement besoin d'eux. Jeremiah, promets moi que tu ne m'abandonneras jamais. Promets-le moi. »

Jeremiah ne savait pas tout de l'histoire de la jeune femme. Par respect pour elle, et même s'il était journaliste, il n'avait fait aucune recherche sur la demoiselle. Il préférait que ce soit elle qui lui en parle, si toutefois, elle voulait ou si elle en avait envie. Il ne comptait pas du tout la forcer à s'ouvrir à lui, sur un sujet qui semblait être encore très difficile pour l'étudiante. D'ailleurs, il n'en trouvait pas de curiosité. Il savait que c'était encore quelque chose de douloureux pour elle, et ne pensait donc pas non plus, une seule seconde que la jeune femme pouvait avoir envie de se confier à lui. Mais ce qu'il savait, c'est que pour Zooey, ces photographies étaient très importantes. Tellement importantes qu'elle avait failli se tuer pour aller les récupérer dans sa voiture en flammes. Jeremiah n'avait donc pas hésité une seule fois à les récupérer pour elle. Parce qu'il aurait aimé qu'on le fasse pour lui si la situation avait été inversée. Il esquissa un sourire quand il sentit la demoiselle resserrer un peu plus son étreinte. Il la garda donc dans ses bras, la laissant se remettre de ce trop plein d'émotions. Il savait que son geste allait la toucher mais pas à ce point là. L'étudiante avait contenu ses émotions jusque là. Elle se détacha un peu de plus pour le regarder. Elle plongea ses yeux bleus dans ses prunelles marrons. Leurs visages étaient proches, si bien qu'ils pouvaient sentir le souffle de la jeune femme sur sa peau. Elle avait les joues et les yeux pleins de larmes. « Ils sont partis. Ma mère et mon père, ma soeur. Ils m'ont abandonné à mon triste sort, trop tôt. J'avais encore tellement besoin d'eux. Jeremiah, promets moi que tu ne m'abandonneras jamais. Promets-le moi. » Il fronça les sourcils à ces mots. Ainsi elle avait perdu ses parents et sa sœur. Cela devait probablement remonté à la pluie de météorites. Beaucoup d'habitants avaient perdu un membre de leur famille. Lui il avait été gravement blessé mais il avait eu la vie saine et sauve, ce qui n'avait pas été le cas pour d'autres. « Ils ne t'ont pas abandonné Zooey... Et jsuis certain qu'ils ne voudraient pas te voir dans cet état. » Il l'observa et remit une mèche de ses cheveux, derrière son oreille. « Et je ne t'abandonnerai pas. Je serais toujours là si tu as besoin de moi. » Il lui fit un sourire rassurant. Il prit le mouchoir qu'elle avait en main et essuya ses joues avant d'ajouter, pour détendre un peu l'ambiance. « Mais évite de le répéter à mes fans. Elles seraient jalouses. » Il sourit un peu plus. Il avança son visage du sien pour déposer un baiser sur son front. Il ajouta ensuite: « Tu dois continuer à avancer d'accord? Le passé c'est le passé. Tu dois les rendre fiers de toi et avancer, parce qu'ils l'auraient voulu.Tu ne penses pas? »

Je détestais ça. Pleurer, me morfondre et ce dans les bras de quelqu'un. Je détestais montrer mes faiblesses, montrer que je n'étais pas la figure forte que je m'évertuais à montrer. Mais tout cela me dépassait, c'était plus fort que moi, largement plus fort que moi. La douleur était si forte, qu'au bon d'un moment ce n'était plus possible de se contenir. Jeremiah avait eut ce geste si généreux, mais outre le bonheur de retrouver ces souvenirs que je croyais déchus, il y avait ce rappel à tout ce qui tournait autour d'eux. Et dès lors, toute la souffrance revenait comme une claque, submergeant tous les bons coté du moment. Dans les bras de Jeremiah, je sentais la pression retomber d'un cran, je me sentais comme protéger du reste, comme dans une bulle. Quand je me détachai de lui, que je plongeai mon regard dans le sien, et que je lui avouai ce que j'avais sur le cœur, il fronça les sourcils - « Ils ne t'ont pas abandonné Zooey... Et jsuis certain qu'ils ne voudraient pas te voir dans cet état. » - me répondit-il calmement. Non, c'est vrai. Il avait raison. Mes parents ne m'avaient pas abandonnés, ils m'avaient été arrachés. Ces foutues roches étaient vulgairement venues s'écraser contre eux, les avaient étouffés et leur avaient ôté la vie. Je trouvais ça purement injuste. En m'observant, il replaça une de mes mèches de cheveux derrière mon oreille. Jeremiah était si gentil avec moi, alors qu'un autre aurait pu passer son chemin. Non, lui il restait. Et c'est de ça dont j'avais besoin. Des personnes qui restent. La solitude et l'indifférence des gens à mon égard avaient créé en moi un certain dégoût de l'humanité, et Jeremiah, peu à peu, par bribes, le détruisait. Il était comme une promesse de quelque chose de mieux. Mais après tout qu'y a-t-il de difficile à trouver mieux et avancer, quand on a tout perdu ? Le jeune homme ajouta - « Et je ne t'abandonnerai pas. Je serais toujours là si tu as besoin de moi. » - Il agrémenta ses paroles d'un sourire rassurant - « Merci. » - dis-je sincère. Mais je ne me leurrais pas, il ne serait pas toujours là pour moi. Car au bout du compte, tous, finissent par partir. Il me prit mon mouchoir des mains, et essuya mes joues trop humides - « Mais évite de le répéter à mes fans. Elles seraient jalouses. » - ajouta-t-il pour détendre l'ambiance. Il sourit encore, étirant un peu plus ses lèvres qui dégageaient tant de sincérité. Je souris à mon tour, j'appréciais ce qu'il faisait pour moi - « Je le garderais pour moi alors. » - Jeremiah avança enfin son visage du mien, et déposa un baiser sur mon front - « Tu dois continuer à avancer d'accord ? Le passé c'est le passé. Tu dois les rendre fiers de toi et avancer, parce qu'ils l'auraient voulu.Tu ne penses pas ? » - Je lui pris la main et répondis - « Si. Je sais que tu as raison. Seulement, c'est si difficile. Mais je te promet d'essayer. » - Je lâcha sa main pour caresser sa joue. Nous nous regardâmes quelques instants, puis je me levai brusquement. Je portai ma paume à mon crâne et dis avec précipitation - « Je suis désolée d'avoir gâchée la soirée. Merci beaucoup pour les photos, vraiment. On devrait peut-être aller se coucher, on a tous les deux besoin de sommeil je crois. » - Je rangeai rapidement les photographies dans mon sac et me dirigeai vers la salle de bain pour me mettre en pyjama. Jeremiah fit de même et nous nous couchâmes chacun dans un lit. Ce soir là, j'eus beaucoup de mal à dormir. Des pensées trop nombreuses m'envahirent la tête, je revoyais toutes les images, juste les plus terribles. Je revoyais le moment ou la police avait découvert leur corps en morceaux, le jour le plus terrible de février 2007. Je ne trouvas pas le sommeil, alors je décidai de rejoindre Jeremiah dans son lit. Espérant le trouver ainsi. Le jeune homme dormait à point fermés, et je me blottis contre lui. Mon visage sur son torse, je fermai les yeux. Demain serait un autre jour.

Les faiblesses étaient inhérentes aux êtres humains. Sans faiblesse on ne pouvait pas connaître nos limites. On ne pourrait pas se connaître réellement. Nos faiblesses étaient le miroir de nos âmes. Jeremiah, comme Zooey, avaient des faiblesses. Même s'il voudrait les cacher. Même si contrairement à la jeune femme, il les acceptait, cela ne voulait pas dire pour autant qu'il était facile de vivre avec elles. Le journaliste n'a jamais été le genre de personne à s'apitoyer sur son sort. Il avait eu quelques coups durs mais il s'était toujours relevé. Il en avait toujours tiré un enseignement qui le menait à avancer encore un peu plus. Il tirait des leçons de ce qui se passait. Chaque chose qui nous arrivait, n'était ni bon, ni mauvais. Il fallait juste faire en sorte que ces choses puissent nous enseigner un peu plus, ce que nous étions. Jeremiah voulait que la jeune femme en prenne conscience. S'il y avait quelque chose qu'il ne supportait pas, c'était de voir les personnes qui s'apitoyaient sur leur sort. La vie était bien trop courte pour le faire. Il souhaitait que la jeune femme aille de l'avant. Il était inutile de pleurer sur un passé qui n'était plus. Elle devait aller de l'avant et faire quelque chose qui puisse la rendre heureuse. C'était le plus important. Il espérait vraiment que son discours n'était pas tombé dans l'oreille d'une sourde. Zooey avait toute la vie devant elle. Et elle devait en profiter et continuer à rire comme elle le faisait. « Si. Je sais que tu as raison. Seulement, c'est si difficile. Mais je te promet d'essayer. » « Je sais...mais je sais aussi que plus tu t'accrocheras au passé, moins tu arrivera à avancer. On ne peut pas vivre éternellement avec des fantômes. » Il l'observa. Lui même avait fait un trait depuis longtemps à l'absence de son père, mort trop tôt. Mais il avait continué à avancer, pour qu'il soit fier de lui. Il voulait lui montrer dans un sens, que la relève était assurée. Et tout ce que Jeremiah souhaitait, c'est que son nom ne s'éteigne pas avec lui, qu'il puisse continuer, qu'on puisse se souvenir de lui, même après sa mort. Il sortit de ses pensées quand l'étudiante posa sa main sur sa joue. Il posa son regard noisette sur elle avant qu'elle ne se lève brusquement. « Je suis désolée d'avoir gâchée la soirée. Merci beaucoup pour les photos, vraiment. On devrait peut-être aller se coucher, on a tous les deux besoin de sommeil je crois. » Il fronça les sourcils avant de répondre, se levant à son tour du lit. « Mais non tu n'as rien gâché, ne dis pas de bêtises. » Il l'observa puis il finit par acquiescer. Oui, il était temps pour eux d'aller se coucher. Il était fatigué. Son mal de crane ne l'avait pas quitté de toute la journée. Il profita que la miss soit dans la salle de bain pour se déshabiller, pour rester en caleçon. Puis il se coucha, se mettant sous les draps. Jeremiah eu aussi du mal à dormir mais pas pour les mêmes raisons. Puis vers le milieu de la nuit, il finit par s'endormir. Il se réveilla le lendemain très tôt. Il se rendit compte qu'une visiteuse était venue dans son lit. Cela le fit sourire. Il resserra son étreinte autour de la jeune femme puis il referma les yeux. Le festival ne commençait qu'à 14h, heure locale. Ils pouvaient donc en profiter pour dormir un peu plus, surtout que son mal de crâne était, pour l'instant, parti. Or cela n'arrivait pas souvent, autant essayer de gagner un peu plus de sommeil pour commencer cette nouvelle journée à Indépendance.

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