Sveltlana Bèttäny & Wyatt Jeremiah

Il était huit heures lorsque je me réveillais. J'ouvris les volets et m'accoudais au rebord de la fenêtre, regardant le décor enneigé d'un œil las. Un jour de plus se levait sur Wellington, un jour semblable à tous les autres, une journée sans couleur et sans saveur. Un jour habituel pour un type misérable comme moi. Je me pris une douche sans y prêter vraiment attention et m'habillais avec les premières choses qui me tombèrent sur la main; un vieux t-shirt gris, une veste en coton épaisse, un jean sombre et ajoutais un coupe-vent vieux comme le monde. Il n'était pas recommandé de fumer avant un examen des poumons mais c'était ainsi; je fumais sur le trajet. Je pris un bus quelconque qui me déposa dans le centre-ville et de là, je marchais en direction du St Lukes Hospital, enfonçant mes pieds dans la neige et ignorant le froid qui trempait mes chaussures. J'arrivais dans le hall de l'hôpital et essuyais mes pieds mouillés à l'entrée. Allant d'un pas traînant vers l'accueil c'est pourtant d'une voix forte et polie que je m'exprimais : « Bonjour, je m'appelle Jeremiah, heu Wyatt Matthews. » L'homme pivota sa tête dans ma direction et fronça les sourcils se demandant sûrement quel était l'énergumène qu'il avait devant lui qui ne savais même pas son nom. Pas de ma faute si dans cette réalité mon premier prénom est Wyatt. « J'ai un contrôle médical pour les poumons. » Ajoutais-je en le fixant. Celui-ci consulta ses fichiers et acquiesça de la tête en m'indiquant les fauteuils d'à côté. Je ne me fis pas prier et allais m'assoir, pas plus ennuyé que d'habitude, pas plus heureux que d'habitude.

Il me semblait attendre pendant des heures lorsqu'on m'appela et qu'on me dirigea vers une pièce ou un médecin allait me recevoir et contrôler l'état de mes poumons. Ayant toussé longuement pendant une visite chez mon médecin généraliste, il avait été alarmé par la teneur de ma toux et m'avait expressément envoyé à l'hôpital consulter un spécialiste. Voilà plus de cinq fois que je venais le consulter. Le médecin que je consultais était bien évidemment moins cher qu'un médecin que j'aurais déniché dans un cabinet privé. Loin d'être riche, ma sœur aînée m'aidait à payer les frais médicaux, je n'aimais pas ça, être nécessiteux, avoir besoin des autres mais elle m'avait répété qu'on ne "joue pas avec sa santé et qu'elle m'aiderait point barre" et comme elle avait de l'influence et une voix surtout très agaçante quand elle s'y mettait, j'avais cédé.

Attendant dans la petite pièce, je m'assis et me rappelais qu'une bonne copine, plutôt une amie travaillait ici, je me demandais si je la verrais aujourd'hui et espérais profiter de cette occasion pour manger avec elle à la cafétéria de l'hôpital ce midi si elle était disponible et aussi pitoyable que ce fut, cette cafétéria était l'une des moins chères de la ville et on ne peut pas dire que je me permettais quelques écarts financiers ce mois-ci... la boîte d'intérim ne m'avait proposé que deux travail ce mois-ci et l'un commencerait lundi et durerait cinq jours. Néanmoins Cassidy Weasthon m'avait contacté et attiré par les avantages alléchants de Livingscorp pendant le bal de charité... elle allait me rappeler comme elle me l'avait dit et j'attendais patiemment son coup de fil...

« Monsieur Matthews. » Dit-il en entrant dans la pièce, laissant la porte ouverte et laissant entrevoir quelqu'un arriver, une infirmière sans doute. « Comment allez-vous depuis la dernière fois ? » « Ça va. Rien de plus, rien de moins docteur. » Il esquissa un sourire rassurant et consultait des notes sur son calepin. « Dans ce cas nous allons passer directement au contrôle médical si vous le voulez bien. Je vous demanderai de retirer votre veste s'il vous plait. » Je m'exécutais et me retrouverai en t-shirt. « Je vous demanderai de bien vouloir tousser s'il vous plait. » Je fis derechef ce qu'il me demandait. « Une infirmière arrive, elle vous prendra la tension pendant que je vous poserai des questions. Répondez-moi simplement, en quelques mots. » Le bras de l'infirmière traversa la porte.

On me demande souvent pourquoi je suis devenue infirmière, comment je fais pour avoir autant de courage, autant de détermination. À chaque fois, je leur réponds la même chose ''parce que''. Je n'ai jamais réellement donner de raison valabe qui puisse aider les autres à comprendre mon choix, chaque fois qu'on me la pose j'ai toujours l'impression que c'était leur choix à eux, mais au fond c'est ma décision, mon choix parce que c'est ma vie. J'ai toujours eu l'impression qu'on voulait contrôler ma vie, comme-ci on voulait prendre les commandes de mes gestes, mes paroles d'absolument tout. Depuis toujours, on porte des jugements sur ma personnalité, des jugements qui sont en fait de faux jugements parce que c'est gens ne me connaissent pas totalement. De toute manière, chaques gestes, paroles qu'on fait, nous sommes jugés. Qui que nous soyions.

Ce matin, je ne me sentais pas spécialement bien, j'avais un terrible mal de tête. J'aurais voulue rester au lit toute la journée et prendre une journée de congé. Je travaille vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Disons que c'est très rare que j'ai un congé à moi toute seule. À six heures du matin, j'avais les deux yeux grands ouvert comme des soucoupes volantes, cela n'arrivait pas souvent, en fait c'était la première fois depuis les deux dernières années. Habituellement, je me levais à sept heures du matin tapant et pas plus tôt. Pendant les soixantes minutes précédant le sept heures, j'étais restée assise sur mon lit, sans ouvrir le moindre rideau. Une faible lueur passait à travers mes rideaux pour venir éclairer mon visage, uniquement mon visage. Quand mon cadran sonna pour me dire que je devais absolument me lever, je levais uniquement ma tête pour regarder autour de moi avant de me recoucher sur mon oreiller. Cinq minutes plus tard, je repoussais d'un geste de main le drap, qui m'avait recouvert tout au long de la nuit, pour aller rejoindre la salle de bain pour ensuite prendre une douche. Cinq autres minutes plus tard, j'étais sortie et fraîche comme une pêche, enfin presque. Là, j'enfilais l'habit habituel avant d'aller dans ma cuisine me faire à manger. Je décidais de manger une seule pomme, tout en la mangant, je regardais mes messages sur mon blackberry. Deux de mon frère, un qui était une publicité que je supprimais. Les messages de mon grand frère, je décidais de ne pas les ouvrir.

« Madame. Rosevelt, j'aurais besoin de vous pour un patient tout à l'heure ! D'accord ? » Étais-je vraiment obligée de le faire ? Oui, parce que je n'étais qu'une simple infirmière qui disait toujours « oui » aux médecins surtout à ce médecin. Nous étions pas spécialement amis seulement par moment, je me demandais pourquoi il faisait ce métier. Enfin bref ! « D'accord » répondis-je tout simplement en retournant à ce que je faisais il y a deux minutes à peine. Vers huit heures et demi, je passais un bras vers la porte et entrais ensuite après avoir indiquée un truc à quelqu'un. Je me retrouva devant Wyatt, un ami à moi en quelque sorte. Je lui souria avant de lui poser comme question - « Tu vas bien ? » Je me foutais carrément de la présence de son médecin alors que j'entourais le bras de Wyatt d'un tensiomètre et de lui sourire de nouveau.

Je reconnus la jeune infirmière qui entrait dans la pièce; Sveltlana. J'esquissais un sourire, impossible de rester stoïque devant un sourie étincelant, aussi doux, aussi rassurant. La jeune femme passa le tensiomètre sur le bras et commença à compresser mon bras dans le but de relever ma tension, je grimaçais. « Je n'ai jamais aimé ça. » Dis-je, un peu grincheux, expression que je perdis immédiatement avec sa question. « Tu vas bien ? » Répondant à la fois aux questions du médecin, je laissais ma réponse en suspens, Sveltlana s'intéressait sûrement plus à une réponse morale que physique, laquelle était donnée précédemment au docteur. « Ça va à part ses rendez-vous médicaux qui n'en finissent pas... » Le médecin me jeta une œillade inexpressive. « Pas contre vous. » Ajoutais-je à son égard. Je pivotais la tête vers Sveltlana, elle était à tout point de vue charmante et je me doutais que bon nombre de patients n'hésitaient pas à lui faire des compliments sur sa beauté évidente. Que voulez-vous, vaut mieux être avantagé par la nature que désavantagé. Personne ne dira le contraire. « C'est fini docteur ? » « Pour le moment oui. » « Et j'aurais les résultats ? » Il semblait plongé dans son calepin en même temps qu'il répétait mes phrases à un dictaphone. « Dans quelques heures. A tout à l'heure monsieur Matthews. » Il adressa un regard à l'infirmière avant de m'adresser un sourire poli mais bref. Sortant de la pièce à grands pas, comme pressé.

« Je me demandais si tu avais une pause, là-maintenant. » Je l'aidais à détacher le tensiomètre. « On aurait put en profiter pour manger un bout, sauf si tu es occupée. » Je remis ma veste et manquais de me coincer la tête en l'enfilant; comme à mon habitude. « Sinon on peut peut-être discuter cinq minutes ? Comment vas-tu, j'ai oublié de te demander. Pas trop surmenée ? » Elle ne prenait pas souvent de congés, mais pour autant que je la connaisse et ça ne faisait pas longtemps, je ne l'avais jamais vu en repos, aimait-elle à ce point son travail ? Le simple fait qu'elle s'intéresse plus aux autres qu'à elle-même la rendait déjà parfaite à mes yeux. C'était une qualité que j'appréciais chez mes amis. Toutefois je n'étais pas un grand bavard et il ne se passait pas grand chose dans ma vie, ce fut ma hantise, ne rien avoir à lui dire et qu'elle réalise soudainement à quel point je pouvais être ennuyeux. Je ne la connaissais pas assez pour affirmer que le silence ne la gênait pas, que mes silences ne la rendait pas mal à l'aise, j'avais même peur de finir par la rendre triste. J'avais un don pour déprimer les gens; je me promis de faire un effort, ne serait-ce que pour ses patients. Qui a envie de recevoir la visite d'une infirmière déprimée ou grincheuse ? Je tentais de faire un effort, ne plus penser à la mort; difficile. Positiver; encore plus difficile. Je me mis à compter le nombre de réalités que j'avais vécut à cause de mon pouvoir et toutes les vies que j'avais gâché en essayant de jouer à Dieu. Le chiffre me déboussola.

Instinctivement, je nous dirigeais vers la cafétéria, j'ignorais si elle pouvait ou voulait manger avec moi mais une chose était sûr, j'avais faim et je devais attendre pour mes résultats, alors manger seul ou accompagné, ça aboutissait vers le même résultat. « On devrait aller manger ailleurs, un de ces jours. » Dis-je comme si l'idée était naturelle, comme si le fait de la voir ailleurs que dans cet hôpital me paraissait normal alors que pas du tout... elle semblait être un élément du décor, pire, elle semblait être une partie de cet hôpital.

Son sourire paraissait perplexe seulement avec Wyatt c'était ça ou rien du tout. Alors ce sourire, je l'appréciais bien quand même puisque avec celui-ci les sourires étaient très rare, Wyatt était le genre d'homme que je décrivait comme de renfermé, grincheux et déprimé. J'avais bien rencontrée des gens comme lui comme par exemple mon père qui était le genre d'homme grincheux, jamais présent pour sa famille et surtout ces enfants. Voilà pourquoi je ne parlais jamais de lui aux personnes qui me le demandait, parce que mon père était un homme distant et renfermé qui ne s'ouvrait jamais au monde extérieur. - « Je n'ai jamais aimé ça. » dit-il quand je commençais à prendre sa pression pendant qu'il mettait ma question en suspens, je m'en foutais qu'il la mette en suspens tout ce que je voulais c'était qu'il me réponde un jour. Même s'il cette réponse arriverait dans deux cents ans, je m'en foutais seulement la réponse en question ne tarda pas à arriver. - « Ça va à part ses rendez-vous médicaux qui n'en finissent pas... » dit-il tout simplement ne remarquant pas le médecin jeter un coup d'oeil. - « Pas contre vous. » Je souriais intérieurement avant de me retourner. Pendant qu'il demandait si le rendez-vous était terminé, ce que le médecin répondit oui. Au moment que le médecin partait, m'adressant un regard bref et un sourire bref.

« Je me demandais si tu avais une pause, là-maintenant. » Alors que je détachais et qu'il m'aidait comme presser d'enlever ce truc maudit. Je regarda l'heure sur l'horloge qu'il y avait dans la petite pièce avant de me retourner vers Wyatt. - « On aurait put en profiter pour manger un bout, sauf si tu es occupée. » rajouta-il ne me laissant pas réellement le temps de répondre. Pendant qu'il enfilait de nouveau sa veste, e regarda l'heure sur l'horloge qu'il y avait dans la petite pièce avant de me retourner vers Wyatt. « T'es chanceux, oui. » dis-je en lui adressant de nouveau un sourire. Décidément, aujourd'hui, j'étais partie pour faire des millions de sourire aux gens seulement j'adorais sourire. - « Sinon on peut peut-être discuter cinq minutes ? Comment vas-tu, j'ai oublié de te demander. Pas trop surmenée ? » - « Oublie les cinq minutes, d'accord. Je vais bien, c'est tranquille cette semaine. » Certaines personnes trouveraient ça stupide de toujours vouloir bosser dans un hôpital et de ne jamais prendre de repos parce que c'était ce que moi, je fesais souvent. Rare était les fois où je restais chez moi sans rien faire. J'adorais venir ici, c'était comme ma deuxième famille et ma deuxième maison. Je passais plus souvent mon temps ici que chez moi, quitte à négliger mes amis et ma famille. Me poussant vers la cafétéria, il avait lu dans mes pensées parce que j'avais vraiment très faim. - « On devrait aller manger ailleurs, un de ces jours. » - « Oui, tu as raison. On devrait, invite-moi tu sais, je mords pas. » dis-je en riant légèrement.

« Oublie les cinq minutes, d'accord. Je vais bien, c'est tranquille cette semaine. » « Je ne t'ai jamais entendue dire que tu étais débordée tu sais. » Nous emboitâmes donc le pas en direction de la cafétéria et nous dirigeâmes vers une sorte de buffet. Par chance, la cafétéria n'était ni bondée ni déserte mais assez peuplée pour me rendre mal à l'aise. Je me sentais mal à cause des autres, rejeté, pas à ma place et croyais sans arrêt qu'on me dévisageait, murmurant que j'étais un meurtrier mais c'était stupide. L'affaire avait parue dans la presse il y a longtemps, les gens avaient sûrement oublié le meurtre d'Isabel, la sœur de la célèbre journaliste locale Sara Hawkins, mon ex-fiancée, la femme que j'avais sois disant tuée. Kristen, ma sœur avait payé la caution pour que je sorte il y a moins de deux ans et je me sentais toujours comme un détritus de la société. Je me grattais la tête, mal à l'aise et tentais de me concentrer sur Sveltlana. « Oui, tu as raison. On devrait, invite-moi tu sais, je mords pas. » « C'est là ou je voulais en venir. » Dis-je en évitant de la regarder et me servant de boulettes de viandes probablement sous vide, protégées de toute bactérie et de tout goût mais qui me permettrait de tenir jusqu'à demain au moins. Comme je ne savais pas comment m'y prendre, je lui demandais, les pinces dans les mains. « Haricots ? » Je me raclais la gorge. « En fait, j'aimerai t'inviter... dans un endroit spécial, pas un endroit bondé ou... un endroit que j'aime, pas très fréquenté... » Je me rendis compte que mes paroles pouvaient véhiculer un autre message et me rattrapais du moins essayais, derechef ce qui semblait être une boulette. « Heu, je veux dire quelque chose comme... Les collines, il y a un endroit ou on peut voir toute la ville... » J'eus peur de paraître ennuyeux. « Je veux dire, je suis sûr qu'un tas de jeunes viennent passer de bons moments là-hauts... » Affirmais-je. J'aimais beaucoup Sveltlana mais c'est vrai que nous ne voyions pratiquement jamais et quasiment pas en dehors de son travail, nous mangions sur le pouce durant sa pause ou prenions une heure ou deux pour un café sans plus. J'avais fais preuve de nombreuses négligences durant les dernières années et je voulais me rattraper mais aussi montrer aux gens que j'appréciais qu'ils étaient plus que des pigeons ou des bouches-trous comme un dit.

« Tu... je veux dire, toi et moi on... on pourrait un de ces soirs aller sur cette colline, enfin sauf si c'est nul, enfin si tu trouve ça nul, ce qui est totalement vrai... non pas que j'ai l'habitude de proposer des choses nulles hein, mais je veux... comment dire hum... patates ? » Désignais-je en me rendant compte que je montrais toujours les haricots. Je baissais la tête et ris de bon cœur, un rire léger, doux. Ce n'était pas vraiment un rencard, quoi que... mais comme me disait mon meilleur ami Jeremiah, ne pas se prendre la tête et foncer, il y a bien trop de femmes sur Terre pour se morfondre d'une veste... mais je n'étais pas comme lui... Je décidais de laisser tomber les plats pour saisir un verre d'eau et me diriger vers une table ou une carafe traînait, en profitant pour me servir, attendant que celle-ci me rejoigne. Trop stupide j'étais pour demander à une fille de sortir, je n'avais pas vraiment grandis, j'étais toujours adolescent. Sûr de moi lorsqu'il s'agissait de draguer ou de parvenir à mes fins mais hésitants lorsqu'une fille attirait vraiment mon attention. Je me rendis soudainement compte qu'être occupé par quelque chose ou quelqu'un me sortait vivement de ma léthargie. J'affichais même un rare sourire sur mon visage.